Mohamed Bajrafil invité du CSIS: un moderniste très orthodoxe (30/08/2019)

Le conférencier connait des versets et des hadiths inédits. Ils permettent de nous faire découvrir la tolérance et l’ouverture qui caractérisent l’islam… A l’aide de menus subterfuges.

Bajrafil_pied.pngLes 11 et 12 septembre, le Centre suisse islam et société traitera du thème: «Face à la radicalisation. Contre-discours et action sociale islamiques». Pour ouvrir les feux: Mohamed Bajrafil, Comorien et Français, enseignant à l’université et imam de la mosquée d’Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne). C’est la nouvelle coqueluche des médias français.

Le genre d’islam que promeut le Centre suisse islam et société (CSIS) est teinté d’ouverture et de modernisme. Mais le Centre n’entend pas rejeter clairement ce que le Coran contient d’inacceptable. Il fait appel à de nouvelles lectures et de nouveaux lecteurs d’où il ne ressort que beauté et humanisme.

En invitée-vedette l’an dernier, Asma Lamrabet expliquait que le Coran  ne contient pas une once de misogynie et que les savants et juristes se sont égarés depuis mille ans dans leurs interprétations. Pas question donc de reconnaitre que si le Coran est d’inspiration divine, il a été fabriqué par des humains et que la version imposée peut être remise en question.

C’est un autre de ces réformateurs new look que le CSIS invite le 11 septembre prochain. Il s’est fait remarquer par son livre «Islam de France, l’an I» (2015) et «Réveillons-nous! Lettre à un jeune Français musulman.» (2018) Le discours contredit agréablement ce que nous avons l’habitude d’entendre: «Nous avons une chance extraordinaire: nous vivons en France, dans un pays en paix, un pays libre et amoureux de la liberté, malgré toutes les limites, toutes les entraves qui existent aussi. Un pays où l’on peut apprendre, étudier, évoluer. Il faut profiter de ces privilèges. On ne peut plus vivre comme autrefois, et c’est merveilleux...» Il condamne fermement «les bigots», soit les obscurantistes. Et rappelle inlassablement que l’islam promeut la liberté de religion.

Les journalistes sont émerveillés.

La France met en pratique  la charia

Pas question de reconnaitre quelques failles à cette religion. La charia, par exemple, est «entièrement miséricorde, et entièrement équité.» La France, «avec ses acquis sociaux» la met mieux en pratique que bien des pays musulmans. «La République, en France, garantit la liberté en particulier le droit de croire ou de ne pas croire, la protection de la vie, le droit de propriété, les conditions matérielles et juridiques de la perpétuation de l’espèce: autant de critères traditionnels permettant de définir la charia.» Les sanctions? Un thème anodin. Et la lapidation? «Un point de jurisprudence sur 1'200’000 questions de droit musulman», mal expliqué et utilisé «pour stigmatiser une communauté».

Pour Bajrafil, cette religion «de paix, d’amour, d’ouverture à l’autre, d’altruisme» brille de mille feux, au présent et au passé: «L’islam s’est toujours adapté partout où il est arrivé.(…) Les spécificités culturelles des uns et des autres ont toujours été respectées et prises en compte par l’islam, quand elle ne remettaient pas en cause les droits de l’homme les plus élémentaires, ni sa foi.»

Ces réformateurs ont besoin de moult artifices pour faire de nous des croyants: versets tronqués, discours embrouillés, ajout de mots ou de phrases qui n’existent pas, etc. Majid Oukacha en donne un exemple: une vidéo où Bajrafil analyse le verset qui enjoint aux hommes de frapper les épouses désobéissantes. Drôle et révélateur.

 

Question foulard, l’imam tient un discours qui doit plonger dans la perplexité nombre de musulmanes: «Que les choses soient claires: je suis persuadé qu’il représente une obligation religieuse (…) Mais il y a loin entre dire cela et en faire, pour les femmes, l’obligation par excellence. Ne pas mettre le foulard n’est pas plus grave que mentir, que faire du tort à ses voisins, que calomnier, voler, manquer de respect à une personne âgée…» Tout de même: tous les jours que Dieu fait mentir calomnier, voler (n’est-ce pas un acte que le Coran sanctionne durement ?) … Quelle sera la sanction?

Bajrafil se joint ainsi à l'immense chœur des hypocrites qui disent aux filles et femmes: il est interdit selon Allah d'aller cheveux au vent, mais... vous êtes libres de choisir.

Et un autre limpide argument: «Au demeurant, quel est le fondement de l’obligation religieuse de couvrir ses cheveux? Un verset du Coran où Dieu dit: «Elles ont à mettre un fichu ou des habits qui arrivent au niveau du cou.»

???? Quelqu’un peut-il m’indiquer la référence de ce verset malencontreusement oubliée par le professeur? Et combien de fois trouve-t-on le terme «fichu» dans le Coran?

L’imam considère que dans les mosquées, «le refus de la mixité est une pure aberration (…) un acte anti divin.» Et il a déniché un grand commentateur pour expliquer qu’un baiser et tous les actes sexuels qui sont commis avec une femme (ou un homme) à part la pénétration relèvent de ces péchés mineurs que Dieu absout. On a juste un peu de peine à distinguer la logique de ce précepte, mais bon… si c’est pour enrayer la fabrique d'obsédés sexuels, on veut bien.

Se serrer la main? Oui, s'il n'y a pas de désir sexuel

L'imam regrette aussi l’opposition de musulmanes à être soignées par des hommes. Et le fait de refuser de serrer la main du sexe opposé. Ce pourrait être un péché, mais si facilement effacé: «s’il s’agissait d’un péché, il relèverait tout au plus de ce qu’on appelle lamam, ces péchés mineur que (…) les ablutions et les prières annulent. (…) D’ailleurs, quand les écoles juridiques ont abordé cette question, elles se sont opposées au serrage de main (…) qu’en considérant la présence d’un désir sexuel; elles ne se sont donc pas opposées au serrage de main en soiMais comment les grands savants repèrent-ils le désir de deux suspects qui s’apprêtent à se serrer la main?

Le Livre, rappelle Bajrafil, permet d’épouser une juive ou une chrétienne, ce qui prouve que l’islam ne rejette pas les autres religions. Qu’en est-il de tous les versets qui condamnent les non-musulmans à l’enfer? Bajrafil conteste, il affirme à moult reprises que le Coran est tout ce qu’il y a de plus sympa envers les autres religions, surtout les chrétiens.  

Le professeur-imam insiste furieusement sur la nécessité de se former à la science.  «…la seule chose que nous devons demander à profusion, c’est la science». «Cet appel à la réflexion, à la science, à la connaissance du monde et de Dieu se retrouve dans plus de 800 versets sur les 6000 que comprend à peu près le Coran… ». Un doux mélange de science et de croyances qui est aussi, heureuse coïncidence, une spécialité du CSIS.

Une science qui conduit notre savant à déclarer que le genre humain «ne connaît qu’une seule origine: Adam pour les croyants, le singe pour les autres.» «le foyer originel de l’islam se confond avec celui de l’humanité tout entière; il remonte à Adam et Ève…»

Question laïcité, l’islam nous a largement devancés: «Nous sommes laïques parce que musulmans.»… «l’islam (…) est laïque par essence» «Que demandons-nous, nous, musulmans? Qu’on nous laisse, simplement, la liberté de pratiquer notre religion comme bon nous semble…»  Eh oui, et là est tout le problème.

Bajrafil reconnait que sa religion telle que pratiquée aujourd’hui est figée et il appelle au changement. «C'est le moment ou jamais d'être intelligent, fin, nuancé, capable d'esprit critique et de remise en cause.»

Une foultitude de frères et de Frères

Bajrafil_débat_oulémas.jpgDans la vraie vie, Bajrafil est très bizarre. Il semble que pour devenir un leader du nouvel islam il est primordial de fréquenter les représentants de l’ancien. Beaucoup le voient en successeur de Tariq Ramadan. Il refuse de condamner la confrérie totalitaire et tient à retenir de Youssef Al-Qaradawi «son ouverture d’esprit». Il apprécie le Conseil européen de la fatwa créé par ce dernier et dont les membres sont des Frères musulmans.

L'imam est membre du «Conseil Théologique des Musulmans de France» composé de sympathisants de la confrérie. L’un d’eux, Mohammed Najah, répond aux sollicitations des visiteurs de son site. «Est-il autorisé d’utiliser des pierres pour se guérir?» «Est-il autorisé de célébrer Noël et le jour de l’an?» Pour avoir une idée du niveau ahurissant des questionneurs et du questionné, voir cette page. Qu’un imam qui prétend représenter le futur radieux de l’islam s’acoquine avec ce genre de personnages est proprement sidérant.

Et finalement pas tant que ça. Notre conférencier fréquente de multiples colloques en compagnie des fondamentalistes les plus toxiques de France. Cette année, il a lui-même invité trois d’entre eux dans sa mosquée: Nabil Ennasri, Abdallah Benmansour et Mohamed Ashaini. Le 24 mai, il a organisé une conférence avec l’antisémite Cheikh Dedew, qui explique entre autres comment battre coraniquement sa femme. Un verset qui semble décidément encore très en vogue dans l'islamosphère.

Au soir du 11 septembre, Mohamed Bajrafil sera appuyé par Michel Younès. Il s’agit d’un théologien qui s’efforce de rapprocher christianisme et islam et de favoriser la diffusion de l’un et de l’autre dans les institutions. Son dernier ouvrage? «Quand la religion s’invite en entreprise».

L’aide sociale musulmane bientôt dans le secteur public?

L’action sociale et la religion en entreprise sont les deux offensives de l’année au CSIS.

Une journée sera donc consacrée au thème «Contre-discours et action sociale islamiques».

Sur la page d’introduction de son flyer, le CSIS annonce: «Les groupes et organisations musulmans répondent aux besoins de leurs membres en offrant des services de consultation, des services d'aide à l'enfance, des programmes éducatifs, des soins spirituels (sic !) et une assistance matérielle et contribuent ainsi à la production de bien-être dans les sociétés occidentales

Notons que, hors les «soins spirituels» heureusement, tous ces services sont offerts par nos sociétés.

Mais le CSIS insiste: puisque les musulman fournissent un bonus de bien-être, merci d’accueillir ces assistants sociaux à la haute spiritualité, et de les rémunérer:

«Bien que, dans de nombreux cas, ces activités puissent être qualifiées d'aide axée sur la communauté, le plus souvent, elles dépassent les frontières des communautés musulmanes pour profiter à la société dans son ensemble. Les acteurs musulmans commencent (…) à négocier la manière dont ils peuvent devenir des prestataires de services pleinement reconnus au sein de l'État providence

Comment islamiser la Suisse et lui en faire financer le processus? Les animateurs du CSIS méritent dans ce domaine le titre de grands savants.

 

Europe-Israël sur les invités du 24 mai 2019 (Christian de Lablatinière)

Mohamed Bajrafil, l’imâm que s’arrachent les médias méconnaissant son univers radical (Joachim Véliocas, Observatoire de l’islamisation)

Les nouvelles figures «modérées» de l’islam de France (Alexandre del Valle)

 

22:27 | Tags : action sociale, coran, fribourg | Lien permanent | Commentaires (13)