Des nuits légères de Téhéran à l’islam intolérant, récit d’une fuite (04/02/2020)
Nahid*, arrivé il y a quelques années à Saint-Gall, est le réfugié idéal. Le statut lui a été refusé, mais l’espoir demeure.
Il est difficile de trouver plus chaleureux que Nahid. Cet Iranien souriant et communicatif, habitant Saint-Gall, semble même plus intégré qu’un Suisse de souche. Aimé par certains, apprécié par beaucoup, il parle aussi bien le français que l’allemand. Des réfugiés comme lui, on en redemande… sauf qu’il n’est pas réfugié, ce statut lui a été refusé.
Nahid, quand et où es-tu né ?
Je suis né à Téhéran en 1991, douze ans après la révolution. Ma famille était pratiquante, mais la religion avait une place modeste. Je suivais des rituels imposés autant par la culture que par la religion, des prières et des prosternations à l’école, le récit d’extraits du Coran. La révolution, mes parents n’étaient ni pour, ni contre… Entendre dire par exemple «les mollahs nous sucent le sang», ça ne les choquait pas.
Et pour toi, quand la critique de l’islam est-elle née ?
J’ai très vite aimé réfléchir par moi-même, choisir des lectures inhabituelles. Je me suis très tôt intéressé à Darwin et j’adorais Dostoïevski. Vers 12 ans, j’ai posé une question à mon professeur: je lui ai fait remarquer qu’entre ce que dit Darwin et ce que dit le Premier Imam -Ali dans l’islam chiite-, il y a quelque chose qui ne colle pas. Il m’a envoyé une gifle et a convoqué mes parents. Je crois que mon rejet de l’islam a commencé là.
As-tu poursuivi l’étude de cette religion ?
Au collège, j’ai complètement changé. J’ai réfléchi, approfondi, je me suis intéressé à l’histoire, à la culture occidentale, aux grands de la littérature comme Dante, ou de la philosophie, comme Nietsche. Je me suis passionné pour les langues, à 12 ans je me débrouillais très bien en anglais. Mais tout cela était en dehors de la religion.
Pas de transgressions?
Si, une partie de ma vie était cachée. J’ai été attiré par le heavy metal, le hard rock, j’ai appartenu à un groupe. J’ai passé de nombreuses soirées avec musique, filles, alcool… A dix-huit ans, j’ai commencé à travailler. Et soudain, le jour fatidique est arrivé: ma convocation au service militaire. Depuis ce jour, fini la belle vie!
Comment s’est passé cette période ?
Ça a été la pire de mon existence! Les garçons, dès l’adolescence, commencent à avoir peur de ça. Tu cohabites avec des gens que tu ne supportes pas, tu fais semblant, tu dois te lever à l’aube aux cris du muezzin, ce que je n’avais jamais fait. J’en ai parfois pleuré, je me suis aussi mis en colère. Le problème, c’est que si tu ne fais pas le service, qui dure deux ans, tu ne peux pas sortir du pays, car tu n’obtiens pas de passeport. Et on te le demande partout... Nous avons passé six mois dans le désert. Pas une femme à l’horizon. Les femmes, c’est une obsession chez les jeunes, mais un sujet tabou.
Et l’islam ?
Sur le plan religieux, j’ai fait des recherches, j’ai lu la Torah, le Talmud, la Bible. J’ai conclu que les religions sont des idéologies absurdes. Cela dit en Iran, les juifs et Israël sont totalement diabolisés. On voit partout des drapeaux d’Israël avec le diable au milieu. Je suis fier d’appartenir à une civilisation née il y a 5000 ans, qui a marqué l’histoire de notre planète. Elle est hélas tombée entre les mains d’un régime fasciste qui se fiche complètement de son passé non-musulman.
Et après l’armée ?
Au collège, j’avais suivi une école de pédagogie. Après le service, je suis devenu prof d'anglais. Et j’ai commencé à voyager.
Je me suis offert des vacances à l’étranger pour respirer, boire tranquille, voir des filles. Lors d’un de ces voyages, en Bulgarie, j’ai rencontré une jeune femme catholique, Maria. Nous sommes tombés amoureux. Je suis allé la voir là-bas et elle est venue en Iran. Nous nous sommes mariés à Sofia. Lorsque j’ai voulu la faire venir pour vivre avec moi, les Iraniens lui ont refusé le visa. Ma femme a été convoquée à l’ambassade iranienne. Ils savaient tout sur nous. On lui a remis une lettre disant qu’un mollah allait venir la marier selon les coutumes islamiques. Il minimisait: «juste répéter quelques phrases, signer, puis vous obtiendrez la carte d’identité iranienne».
Elle a refusé, on lui a renouvelé le refus de visa et nous sommes restés chacun chez nous. C’est là que mon projet de partir est né. Mon passeport était échu, on refusait de le renouveler. Je me suis débrouillé, j’ai tout laissé d’un jour à l’autre et j’ai rejoint ma femme. Mais dans sa famille non plus, je n’étais pas le bienvenu. Après un périple de quelques mois, nous sommes finalement arrivés en Suisse.
Avez-vous fait une demande d’asile ?
Oui, mais on ne nous a pas crus. Elle a été refusée. Ça a été un moment terrible. En plus, une quinzaine de jours avant le vol de retour, ma femme est tombée malade. On nous accordé un permis provisoire pour motif médical.
Depuis lors, nous avons eu un petit garçon. Nous avons beaucoup d’amis ici, ce qui compense presque l’absence de ma parenté. J’adore ce canton! Et j’ai bon espoir d’être bientôt autorisé à y rester avec ma petite famille.
Nahid a toujours travaillé. Il a exercé diverses activités dans un centre pour requérants d’asile. «J’ai vu des musulmans parmi les plus dangereux qui recevaient l’asile. Parfois, j’avais envie de me taper la tête contre les murs en pensant au futur de la Suisse. J’ai rencontré des personnes qui étaient là depuis des décennies, à l’aide sociale, qui ne faisaient pas le moindre effort pour s’intégrer et d’autres qui ne parlaient pas un mot de français après 20 ans passés ici. Ça m’attriste pour ce pays.»
Nahid a aujourd’hui suivi une nouvelle formation et s’apprête à changer d’activité. Il attend avec confiance le sésame qui lui permettra de rester en Suisse.
* Pseudonyme
09:51 | Tags : nahid, saint-gall, iran | Lien permanent | Commentaires (5)
Commentaires
On devrait se mobiliser pour cette petite famille!
Cet article est à envoyer à Berne pour qu’ils revoient leur politique à travers les dires de cet homme courageux!
Que recherchent les autorités Saint-Galloises? Faire la politique de l’autruche autour de leur désastreuse intégration des migrants ? Qu’il vaut mieux renvoyer cette petite famille à l’aventure avec les risques que cela comporte, plutôt que de prendre le problème des migrants profiteurs qui devraient être expulsés dans leurs pays! Les pays arabes sont des pays riches! Ne l’oubliez pas! Les contribuables n’ont pas à payer pour ces grandeurs et pour la corruption de leurs gouvernants ! Marre de cette faiblesse européenne dans laquelle s’infiltre AUSSI la Suisse!
ABE
Écrit par : Patoucha | 04/02/2020
Si des personnes ayant ce profil sont refusées à l'asile, c'est que les critères utilisés par les fonctionnaires chargés d'étudier les dossiers sont trop formels et sont inadéquats pour prendre en compte des valeurs humaines incontournables. Ce filtre indadapté permet à des demandeurs indésirables d'être acceptés et à d'autres en situation d'urgence d'être refusés.
Écrit par : Abbé Alain René ARBEZ | 06/02/2020
Situation à mettre ne rapport avec celle d'Abu Ramadan dans le billet précédent : Abu Ramadan a reçu l'asile, et même un permis C et l'AVS, alors que le bon sens voudrait que tous ces avantages lui aient été refusés. Nahid et sa femme ont vu leur demande refusée, alors que le bon sens voudrait qu'elle ait été acceptée.
Mais le bon sens fait-il bon ménage avec le droit et la jurisprudence ?
Le droit d'asile que nous connaissons aujourd'hui en Europe est issu de la convention de Genève de 1951. A l'époque, on imaginait que seuls des innocents pouvaient être persécutés par des Etats, Etats évidement potentiellement fascistes tels que l'Allemagne nazie. La convention européenne des droits de l'homme a été conçue quelques années auparavant avec le même esprit : un individu forcément innocent, doit être défendu face à un Etat qui tend forcément à être totalitaire.
Or que voit-on ici ? Abu Ramadan, un militant islamique probablement poursuivi par son pays car il y répand des thèses dangereuses, demande l'asile. Et là, il semble à première vue remplir les critères : puisqu'il est poursuivi par un Etat pour ses idées , il est forcément innocent.
Du moins dans l'esprit des juges qui ont été à l'origine de la jurisprudence appliquée de nos jours. Car si nos juges avaient appliqué correctement l'article 17 CEDH, qui précise que ceux qui oeuvrent à détruire les droits de l'homme ne peuvent pas s'en prévaloir, Abu Ramadan aurait été débouté. Car cherchant à détruire les droits de l'homme, il ne devrait pas pouvoir les invoquer à son avantage.
A contrario, Nahid et sa femme sont simplement de véritables réfugiés, qui ne pouvant plus vivre dans une théocratie islamique, ont déposé une demande d'asile en disant la vérité. Peut-être que leur récit était moins dramatique que celui d'Abu Ramadan et de celui de tant d'autres qui savent très bien dire ce qui est attendu d'eux. Les fonctionnaires fédéraux ont peut-être pensé que Madame, n'avait qu'à faire moins d'histoires et se convertir à l'islam. Car avec le dogme de "l'ouverture à l'autre", on nous a appris à compatir aux convictions des islamistes ou à celles des frères musulmans plutôt qu'à celles des chrétiens.
Il n'y a qu'à voir le choeur de ceux en France, à gauche, qui pensent que la jeune Mila n'aurait pas du "insulter l'islam" (Question : l'islam a-t-il des sentiments ? est-ce une personne qui peut se sentir insultée???) , alors que les mêmes personnes ne se sont pas émues quelques jours plus tôt des paroles de Frédéric Frommet sur France inter ("Jésus est pédé").
En tout les cas, il faut de toute urgence réformer le droit d'asile et commencer à appliquer l'article 17 CEDH : pas de droit d'asile pour les ennemis des droits de l'homme.
Et surtout, merci à Nahid qui nous redonne un peu d'espoir. Des réfugiés comme lui, ce serait cela le véritable enrichissement.
Écrit par : Sophie | 06/02/2020
Où sont les collectifs de gauchistes, d'habitude si prompts à se mobiliser pour empêcher les renvois ?
Et si nous créions un collectifs de fachos islamophobes de droite pour défendre ce couple ? Si on se cotisait pour leur offrir un bon avocat ?
PS: qu'est-il advenu de ce jeune africain, blessé aux Tattes, qui était devenu un véritable martyre des renvois si injustes ? Son motif d'asile était qu'il est orphelin et qu'il ne se plaisait pas chez ses grands-parents. Si ça, ça passe, alors ce couple devrait pouvoir rester aussi....
Écrit par : Arnica | 07/02/2020
La Suisse et son ex-ministre Micheline ont octroyé plus de 150 passeports diplomatiques aux sbires de feu soleimani, vous savez celui qui faisait assassiner tout ce qui bronchait dans l'empire des sanguinaire enturbannés et milliardaires incontestables, comme quoi les milliards pillés au populations perses créent des liens indestructibles entre le PS genevois et la barbarie et la tyrannie.
Écrit par : Bernoyer | 08/02/2020