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  • Intellectuelles musulmanes: le voile dans le viseur

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    Dans ce livre bref mais dense, Hamid Zanas interviewe 17 musulmanes qui s’expriment sur le statut de la femme. Elles traitent du corps et de la sexualité, des relations entre religion et raison, deZanas3.JPG  l’origine humaine du Coran, de la mixité, du retard du monde musulman. Plusieurs d’entre elles jouent un rôle majeur dans leur pays dans le combat pour l’égalité et la démocratie. Je ne saurais trop recommander cette stimulante lecture.

    J’ai choisi, pour illustrer cette problématique, de me centrer sur des citations relatives à la signification du voile selon la vision de ces intellectuelles .

    Elham al Manea, Helvético-Yéménite, enseignante à l’université de Zurich, auteure d’un appel aux femmes musulmanes pour qu’elles ôtent leur foulard:

    Le hidjab reflète une idéologie politico-religieuse qui désigne la femme «comme source de vice dont il faut protéger l’homme en la rendant responsable de la séduction qu’elle exerce sur de pauvres êtres faibles. (…) C’est une idéologie qui considère l’homme comme un animal enragé, avide de chair féminine et incapable de maîtriser ses pulsions. Je n’ai jamais compris en quoi la femme était libre de son choix quand le discours qu’on lui tient dit en substance: si tu ne portes pas le voile, tu iras en enfer, à toi de choisir!»

    Abnousse Shalmani, Franco-Iranienne, cinéaste et écrivaine:

    « (…) dans l’espace musulman, le corps de la femme est obsessionnel. Dès que des barbus prennent le pouvoir, la première loi qu’ils votent est le port du voile obligatoire. Comme si, tant que le corps des femmes est en liberté, leur pouvoir était en danger. De plus, voiler le corps des femmes (et des petites filles) est aussi le moyen le plus visible de se faire (re)connaître comme musulman.
    »En voulant couvrir la femme de pudeur, les barbus ont sexualisé à outrance le corps des femmes. L’obscénité du corps féminin est d’autant plus visible qu’il est recouvert.

    »Le voile est le symbole de l’inégalité homme-femme. Le voile n’est pas seulement un droit. Cela sous-entend une série de convictions qui sont incompatibles avec la République et la démocratie. (…) Que certains utilisent un discours où il est question de liberté pour défendre un voile qui instaure la discrimination, c’est absurde.

    »Qu’y a-t-il de si dangereux dans le corps d’une petite fille pour le recouvrir ainsi? De quoi ont-ils si peur? En recouvrant les petites filles comme des femmes, en plaçant leur corps au même niveau que celui des femmes, le voile les sexualise. Un corps qui doit être recouvert, c’est un corps qui peut inspirer la concupiscence.»

    Monia Sanekli, professeure à l’université de Tunis, militante pour la démocratie et la modernité:

    «Les gens qui couvrent le corps de la femme veulent dire implicitement que celui-ci est un péché, qu’il relève d’une nature médiocre qui ne mérite aucun respect. Cela veut dire aussi que le corps de l’être humain n’est pas la base de sa vie. Donc ce voile est une condamnation du désir féminin comme du désir masculin. Ainsi le corps est devenu interdit. Le message du voile est très clair: il annonce la mort du corps. (…) Oui, l’idée du voile suppose évidemment l’existence d’un mâle, soit incapable de contrôler ses instincts, soit sexuellement impuissant. »

    Raja Ben Slama, écrivaine et psychanalyste tunisienne:

    « Chez ces névrosés, la femme est très désirée et en même temps détestée. D’où la peur des femmes et le désir de les voiler, tout en les désirant fortement, de les utiliser comme objets de plaisir, et de se laver ensuite pour revenir à la propreté et la pureté, et ainsi de suite… Le névrosé, c’est exactement celui qui dit ou pense que «toutes les femmes sont des putes sauf ma mère».

    Zineb El Rahzoui, journaliste marocaine, collaboratrice de Charlie Hebdo:

    Zineb.jpgLe voile, une liberté parmi d’autres? «C’est un vrai sophisme, car le voile lui-même est contraire à toute liberté personnelle. Peut-on oser parler de liberté quand il s’agit d’adolescentes et de très jeunes filles de moins de 10 ans! Peut-on évoquer une quelconque spiritualité à cet âge-là? Et ce n’est pas que ça, regardez par exemple comment les jeunes musulmans d’Occident sacralisent la virginité au moment où les jeunes ont dépassé cela au Maroc!»

    Joumana Haddad, écrivaine, poétesse et journaliste libanaise:

    «Le voile n’est pas, comme certaines essayent de le défendre, l’expression d’une diversité «culturelle», mais bel et bien un outil de différenciation et de discrimination religieux, du simple fait qu’il est imposé strictement aux femmes, et qu’il n’existe pas une expression culturelle équivalente pour l’homme musulman. C’est la femme qui est la «aoura», c’est à elle de se cacher et de passer inaperçu.

    »Cette hyper-sexualisation de la femme représentée par le voile, ou pire par la burqa, est à l’imageZanas2.jpg de l’hyper-sexualisations de la femme Playboy. Et le comble, c’est que les féministes arabes qui osent soulever ces sujets tabous, sont toujours accusés d’être influencées par un féminisme «occidentaliste» et «blanc» et ce afin de les marginaliser, d’étouffer leurs voix et de minimiser leur importance. (…) Les droits humains sont universels, ils ne sont pas le monopole de l’Occident.»

    Sanaa El Aji, journaliste, écrivaine et chroniqueuse marocaine:

    «Mais en Égypte, 72 % des femmes qui subissent quotidiennement le harcèlement sexuel sont voilées et niqabisées. N’est-ce pas une preuve suffisante que la problématique est liée principalement aux comportements et perceptions masculines et non à la façon dont les femmes sont habillées? Sinon, qu’en est-il des viols de jeunes enfants ? Cela se produit-il en raison de leurs vêtements excitants? (…) je reste convaincue que l’homme qui ne se contrôle pas n’a pas encore atteint le premier degré de l’humanité. »

    « Non! Nos voix ne sont pas un honte », Les Editions de Paris, 2015.

    Les musulmanes progressistes condamnent avec des propos souvent plus cinglants que les nôtres la signification du voile. Exemples tirés du dernier livre de Hamid Zanas "Non! Nos voix ne sont pas une honte".