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  • 2. Le conseil fédéral rejette mes critiques du Centre islam de Fribourg

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    Entretien avec Svenja Strahm d’Eco-plan le 13 avril 2022. Elle est assistée de deux collègues silencieux, car peu familiers avec le français. Je demande si je peux avoir la copie de cet entretien. Ils n’en font pas. Je choisis donc d’enregistrer moi-même. J’ai raccourci et éclairé quelques obscurités du langage oral.

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    Illustration Simon

     

    Quel lien avez-vous avec le CSIS, quel est votre rôle, quelle collaboration?

    Il ne s’agit pas de collaboration. J’ai contacté le CSIS comme journaliste, pour obtenir des informations. En général on me les a données, mais pas trop… À un moment donné, j’ai cessé d’avoir des contacts, car j’ai vu que le but du CSIS était de m’ignorer. Par exemple, j’ai envoyé cette brochure sur laquelle Monsieur Marchesi s’est basé et je n’ai pas reçu l’ombre d’une réaction.

    Et elle s’est bien passée cette collaboration? Vous avez dit qu’ils ont répondu. Y a-t-il des choses qu’on pourrait améliorer?

    Ils auraient pu répondre plus longuement, mais j’ai senti qu’il était inutile d’essayer. Pour moi il ne s’agit pas de la brochure spécialement, mais des reproches que je fais au CSIS de manière générale.

    Deuxième sujet: quel est votre appréciation générale du CSIS? Son impact? Ses points forts? Ses points faibles?

    Pour moi il a un point fort… ou un point faible… c’est d’exister. Je conteste ce centre dans ses fondements, dans sa stratégie, dans ses productions scientifiques qui me paraissent assez souvent biaisés.
    Je conteste l’existence même du CSIS et je souhaiterais qu’il devienne une simple faculté de théologie islamique. Tout ce qu’il fait est grave. Hansjörg Schmid son fondateur et directeur, affirme que la laïcité est de plus en plus contestée, que nous sommes déjà dans une société post-séculière. Une société séculière m’est extrêmement chère, de même que la démocratie, de même qu’un certain nombre de valeurs attachées à cette démocratie.
    L'égalité entre hommes et femmes, par exemple, qui existe assez peu dans les centres islamiques.

    Qu’est-ce qui changerait si le CSIS devenait une faculté de théologie?

     Il n’y aurait pas toute cette stratégie qui affaiblit notre société séculière. Il n'y aurait pas un centre qui a pour but de favoriser la présence de l’islam dans un maximum d’institutions, puisqu’il désire former, éventuellement faire financer les staffs des mosquées. Ce qu’il veut, c’est réintroduire la religion dans notre société alors que nous avons eu quelques problèmes à l’en faire sortir.
    Le CSIS s’appuie sur la diversité religieuse pour dire qu’on ne peut plus interdire aux religions de s’affirmer, elles doivent pouvoir s’exprimer. Le problème, c’est qu’il n’y a qu’une seule religion qui cherche à s'affirmer, à être visible, qui revendique de pouvoir exercer ses rites, ses mœurs -souvent bigots, ringards et dangereux.
    Si l’islam de ces associations prend de plus en plus de pouvoir, c’est négatif pour notre société.
    La manière qu’a le CSIS de louer les associations musulmanes est inacceptable. Il fait comme si c’étaient des merveilles dépourvues de radicalisation, qui au contraires passeraient énormément de temps à lutter contre elle.
    Les Frères musulmans, les Turcs, les Wahhabites, les Abaches (une dissidence de l’islam), ces courants n’auraient soi-disant aucune influence. J’ai rédigé de nombreux articles où je montre, je démontre, parce je tiens beaucoup aux sources- que de nombreuses associations sont au contraire imprégnées par ces idéologies.
    Chesnot et Malbrunot dans Qatar Papers ont confirmé ce point de vue. La petite blogueuse, on peut faire comme si elle n’avait rien dit, mais c’est un peu plus difficile pour des journalistes connus et estimés. Ils montrent que les Frères musulmans sont très actifs, en Suisse aussi.

    La Mosquée de Lausanne, elle, est issue du courant Abache. C’est grâce à mon offensive et à celle de l’Association suisse vigilance islam (ASVI) que cette mosquée a dû renoncer à présenter sa conception de l’islam, sommet de haine et de mépris des femmes. Là encore, ce n’est pas le CSIS qui a fait évoluer les esprits, d’ailleurs il ne les fait jamais évoluer.
    Donc, j’ai écrit des articles, 24 heures l’a fait, Chesnot et Malbrunot l’ont dit: il y a un vrai problème d’idéologie religieuse dans de nombreuses mosquées. Le CSIS ne veut rien voir. Et ça pour moi, c’est incroyable!

    - Est-ce que le CSIS pourrait trouver une manière de travailler avec des gens plus critiques que maintenant?

    Je ne vois jamais le CSIS proposer une évolution des esprits. Il montre lui-même dans de nombreux écrits, les «Papers» notamment, à quel point le conservatisme et les visions discriminatoires sont présentes dans ses mosquées.
    Une émission de la radio suisse romande, Vacarme, fait un reportage dans un atelier organisé par le CSIS sur la sexualité. Qu’apprend-on de ces mosquées si merveilleuses, si modernistes, qui offrent tant de services à la société suisse? On entend
    une spécialiste musulmane poser ce qu’elle appelle «le cadre musulman»: une jeune fille musulmane ne doit pas se marier avec un non musulman, mais un homme oui, il peut épouser une non-musulmane.

    Et ce qui est le plus fou c’est quand le CSIS lui-même fait un discours complètement rétrograde sur les successions, absolument ahurissant de la part d’un centre qui se prend pour la prunelle de l’évolution bénéfique des musulmans. Il fait une interview du codirecteur du CSIS qui explique aux familles comment elles peuvent déshériter une fille et correspondre ainsi au droit islamique.

    Déjà, je trouve indécent de prendre l’exemple de la manière de déshériter quelqu’un, ce n’est pas le rôle du CSIS. Mais poser une question pareille en prenant pour exemple une FILLE! Selon le droit musulman, le frère doit hériter du double de sa soeur. C’est incroyable!

     

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    Illustration Simon

    L’ASVI a envoyé l’article que j’ai rédigé sur ce «Papers» à plusieurs bureaux de l’égalité, mais pas au SEFRI. C’est pourtant lui, votre mandataire, qui m’a répondu en invoquant «la liberté académique!» Comment ose-t-il dire cela? Le SEFRI qui finance pour 500 000 francs annuels le CSIS trouve très normal que ce centre censé valoriser les musulmans dans ce qu’ils font de bien… est tout à fait d’accord qu’il explique aux musulmans comment le droit suisse peut permettre de déshériter une fille. Ce n’est pas n’importe quel professeur qui a fait ce Paper, c’est le CSIS ! Qu’il en arrive là, ça me dépasse!

    Si je vous comprends bien, ce que fait beaucoup le CSIS, c’est décrire la situation dans les associations musulmanes… 

    Non, il ne décrit pas la réalité, il dit: ces associations sont merveilleuses, elles sont formidables, elles œuvrent au bénéfice de la société. Or dans ces Papers, par mégarde, on lit des choses qui sont tout le contraire, que ces associations sont extrêmement conservatrices! Mais jamais il ne le remarque. Il ne fait pas l’analyse de ce conservatisme, il fait comme s’il n’existait pas! Moi je lis et je découvre par exemple que la majorité des imams est d’accord avec ce droit islamique de l’héritage. Le Paper note que seule une toute petite minorité voudrait s’en référer au droit suisse et abandonner le droit divin. Le CSIS le dit, mais il ne critique pas!
    Jamais le CSIS ne critique quelque chose, en revanche pour les compliments, c’est extraordinaire!

    Et je pense que ce centre contribue au caractère très régressif de ces associations en disant que les musulmans doivent pouvoir pratiquer leur rites et leurs mœurs dans l’espace public. Par exemple dans les entreprises… en fait partout. Le foulard partout, Mallory Schneuwly estime par exemple que le foulard des petites filles, c’est parfait. Ces revendications causent des conflits dans toutes les sociétés occidentales dès qu’il y a une partie importante de musulmans. Bien sûr, c’est une minorité qui porte ces revendications soutenues par le CSIS, mais le fait est que c’est elle qui est à l’offensive et à laquelle hélas nos gouvernements font beaucoup de concessions.

    Vous dites qu’il y a une contradiction entre ce que le CSIS décrit dans les Papers et ce qu’il dit en public. Par exemple il ne critique jamais les musulmans, mais il fait des critiques…

    Il ne fait pas de critiques, il fait des constats et encore même pas! Il fait des descriptions toujours positives.

    Dans les Papers, il ne fait quelquefois pas de conclusions après avoir montré les différentes opinions des musulmans…

    D’un côté il y a un jugement, un grand jugement permanent qui dit ces associations sont formidables dans leur intégration, dans leur lutte contre la radicalisation, donc là il y a un jugement. Mais quand ces associations se manifestent comme extrêmement conservatrices, par exemple l’opposition à l’homosexualité ou à une certaine liberté de mœurs, là il n'y a plus de jugement.

    Il n’y a pas une sorte d'égalité de traitement… 

    Oui, les apprécier, mais pas les critiquer. On a l’impression que ce serait plutôt son rôle. Mais par exemple quand il parle dans son étude de cette mosquée abbache de Lausanne, même là il ne critique pas alors que ce n’est pas vraiment son modèle de mosquées. Il n’introduit dans son «étude» aucune information dérangeante... Cette mosquée a une vision hallucinante de haine, et il n’a rien vu, le CSIS.

     Peut-être qu’on pourrait approfondir un peu, parce que c'est à la fois des effets négatifs et des effets positifs que vous voyez…

    Excusez-moi, je ne vois pas d’effets positifs. Je ne vois que des effets négatifs et comme je vous l’ai dit, notamment l’affaiblissement de la laïcité et de notre société séculière. C’est un but constant, répété par le CSIS de vouloir rendre efficaces ces staffs des mosquées -qui sont tous des religieux, des gens qui pratiquent et qui croient. Il répète constamment que ces mosquées devraient être financées pour leurs multiples activités, on pourrait professionnaliser ces gens qui enseignent la religion, puis elles pourraient aller dans les institutions profanes et là, on pourrait les financer.

    C'est vouloir introduire partout cette religion islamique, puisque je le répète c’est la seule qui revendique de pratiquer ces rites, ses mœurs, respecter des codes alimentaires, vestimentaires dans l’espace public.
    C'est quelque chose de terrible pour moi!

    Vous ne pensez pas qu’il y a une stratégie à long terme aussi de les séculariser?

    Séculariser qui?

    La plupart des personnes musulmanes

    Je ne comprends pas votre question. Hansjörg Schmid, directeur du CSIS, affirme que nous sommes dans une société post-séculière et il en est très content. Et en plus, ce centre est destiné – même s’il n’est pas interdit pour les autres – à des croyants et pratiquants. Donc la société séculière, elle est très très loin.
    Heureusement, je ne vois pas encore les effets du CSIS liés à cette volonté d’introduire l’islam, ses experts et ses formateurs dans tous ces lieux que beaucoup de musulmans fréquentent qui sont encore des lieux profanes. Je ne vois pas encore les effets du CSIS et j’espère que ça va durer. Mais je doute!

    Pensez-vous que cet effet est aussi négatif en Suisse alémanique? Parlez-vous seulement de la Suisse romande?

    Je parle surtout de la Suisse romande, mais j’ai quand même cité dans mes articles des enquêtes faites en Suisse alémanique qui n’étaient pas très rassurantes pour pas mal de mosquées, notamment des Balkans. Des enquêtes de grands journaux alémaniques ont montré qu’il y avait des problèmes semblables. Donc je connais beaucoup mieux la Suisse romande, mais je suis aussi ce qui se passe en Suisse alémanique. Et je ne vois pas de quoi être rassurée.

    Je fais des articles montrant le degré de conservatisme, voire pire pour le CCML de Lausanne qui a invité le djihadiste Ben Hassen. Je connais mieux la Suisse romande pour avoir fait des recherches, vous constaterez d’ailleurs que je suis soucieuse de donner des sources, de faire des citations, je suis très attachée à ces outils de journalisme, à cette déontologie qui empêche d’affirmer sans preuves.

    Vous avez exprimé vos craintes à propos des activités musulmanes dans l’action sociale. Or, cette discussion existe aussi pour l’Église chrétienne. Est-ce que là vous avez les mêmes craintes?

     Que l’État finance le travail social chrétien? Là-dessus je n’ai rien vu, cette demande chrétienne ne doit pas être très forte. Il n’y a pas d’offensive comme pour l’islam.
    Mais je ne voudrais ni l'un ni l'autre, je trouve très grave un travail social d’origine religieuse financé par l’État. Chrétien ou musulman c’est pareil. Je ne peux pas m’imaginer avoir besoin de l’État parce que j’ai des problèmes et arriver dans un centre où je vois trois femmes en foulard. D’une part, je serais très mal à l’aise, d’autre part si je suis musulmane, j’aurais juste un peu envie de me faire servir par une de mes «sœurs». Ce serait extrêmement grave. Cela dit, je ne vois pas les chrétiens demander à être visible avec des signes divers et variés comme les musulmans en ont tellement.

     Est-ce que vous voyez d’autres effets du CSIS?

     Négatifs ou positif ?

     Ce que vous