Les Suisses voteront sur l’interdiction de la "burqa" (niqab). Le texte a obtenu de justesse, les 100'000 signatures requises. Elles ont été vérifiées par les administrations communales. Le comité d'Egerkingen, qui est aussi à l'origine de l'interdiction des minarets, était le maître d’œuvre. L’UDC n’a pas contesté, mais pas soutenu non plus, elle avait d’autres priorités. Ses membres, hors les jeunes, se sont donc peu mobilisés.
Quelques semaines avant la date limite du 15 septembre, le comité a lancé un appel de détresse que d'innombrables internautes de Suisse ont répercuté et auquel de nombreux citoyens ont répondu. Dix mille signatures manquaient, elles ont afflué.
Quelques personnalités peuvent se targuer d’avoir atteint à elles seules des scores stratosphériques, tel Erwin Lötscher, un Lucernois de 76 ans qui a réuni 9700 signatures ou Giorgio Ghiringhelli (à l'origine de l'interdiction du niqab au Tessin) 8000 avec l’aide de la Lega.
L’Association vigilance islam n’a pas été en reste. Grâce à un formidable organisateur (qui doit hélas rester anonyme), des membres du comité, des adhérents, des sympathisants ont sillonné plus d’une vingtaine de villes romandes durant autant de samedis. Ils ont consacré sueur et sous (pour le train et le repas de midi) à cette activité. Avis aux nombreux cotisants retardataire, aux généreux donateurs et à ceux qui hésitent encore à adhérer: ce genre d’actions militantes méritent d'être financées par l’ASVI.
Au total, nos vendangeurs ont rapporté plus de 3000 paraphes, soit la moitié du total de la Suisse francophone. Il faut dire que celle-ci se fait remarquer par sa faible mobilisation, elle a glané (selon notre dernier chiffre) moins de 7% du total des signatures.
Les difficultés à réunir ces 100'000 paraphes rendent les fous joyeux, ceux de droite (hors l’UDC) comme de gauche. Ils reprennent leurs antiennes: si peu de burqas, volonté de stigmatiser la communauté musulmane, moyen erroné de lutter contre l’extrémisme, etc., etc. Les socialistes sont embarrassés, car pas mal de leurs membres sont tentés par l’interdiction. Ils étudient en lieu et place «une loi encadrant les pratiques religieuses, la formation d’imams ou le financement d’Églises.» (sic) On en a l’eau à la bouche! Mais on attend tout de même avec intérêt 2019, année où devrait avoir lieu le vote.
Pour Andrea Caroni, conseiller aux États PLR, la population ne se sent pas concernée. Croit-il vraiment que les violences de la planète d’Allah, le prêcheur de Bienne et quelques autres, nos affaires de terrorisme, le livre de Saïda Keller Messahli – et le mien- qui montrent le radicalisme des mosquées ont fait sérieusement diminuer les 70% de Suisses qui se prononçaient en août 2016 pour une interdiction du niqab?
Les communautés musulmanes vont aussi, toute honte bue, défendre avec davantage de détermination la présence dans nos rues d’un des plus sinistres symboles de radicalisme et d’oppression de leur religion qu’elles ne l’ont fait pour les minarets. Pascal Gemperli-le-très-modéré l’annonce.
Notre expérience du terrain nous a fait beaucoup penser à un autre sondage, celui d’août 2017 qui révélait que 38% des Suisses se sentent menacés par les musulmans. Nous en avons rencontrés.
Un nombre étonnant de personnes sollicitées s’enfuyaient dès qu’on prononçait le mot «islam», comme s’il les brûlait. De nombreux autres disaient clairement «avoir peur des musulmans». Peur de quoi au juste? Les intéressés ne répondaient pas. Ils ne signaient pas non plus.
Un autre contingent, non négligeable, a bizarrement refusé d’apposer son paraphe, convaincu que les carottes sont cuites: rien ne peut plus arrêter l’offensive de l’islam! D’autres se sont abstenus, parce qu’ils avaient peur (encore!) d’être repérés par leur administration communale lors du contrôle des signatures… Et d'être dénoncés à des musulmans? Ce genre de fantasmes laissent tout de même songeur. Comme ces paroles définitives: «Non, je ne signerai pas, c’est trop tard. Il faut se soumettre! Ça durera un certain temps, puis peut-être qu’un jour, les choses changeront».
Une recherche sur ces perceptions et leur origine serait fort intéressante si nos savants voulaient bien abandonner un peu l’étude des discriminations et de l’hostilité dont souffrent ceux qui se considèrent désormais comme les seules victimes des problèmes que certains d'entre eux posent.
Notons aussi que la presque totalité des personnes sollicitées ignoraient l’existence de l’initiative.
Le quota de signatures a été atteint de justesse, grâce entre autres aux militants de Vigilance Islam. Ils ont découvert dans une partie de la population une peur qui va jusqu’au fantasme.