Les excisions que l’on affirme « symboliques » sévissent dans les trois provinces musulmanes du pays. Les autorités bouddhistes se préoccupent comme d’une guigne du fléau.
Une occasion de signaler les 50 pages de critique consacrées à Islamophobie ou légitime défiance? par une fidèle lectrice.
On savait que la Thaïlande est l’un des pays ignorés des statistiques de l’UNICEF qui excisent. Le Guardian nous apprend l’ampleur du fléau. Comme sur toute la planète musulmane qui pratique des mutilations, les mères croient répondre à une injonction de leur religion et de leur prophète. Ce que leur hiérarchie religieuse confirme.
J’ai découvert cet article sur la page Facebook du Forum pour un islam progressiste. Il révèle que le fléau touche les trois provinces musulmanes de la Thaïlande, situées au sud du pays. Les MGF semblent systématiques. Les guérisseuses ont presque disparu, mais pas la pratique, qui se déroule désormais en milieu médical.
Les mutilations sont censées être du type IV, la forme la moins intrusive : brulure, grattage, piquage, incision du clitoris… Incision, pas excision, mais nul ne garantit que le clitoris résiste à l’intervention. Ne serait-ce que par sa taille minuscule, il peut être facilement coupé par erreur. L’exemple de l’Indonésie montre que la soi-disant pratique symbolique est en réalité, dans une grande majorité des cas, une véritable excision.
Ces interventions sont à juste titre classées comme les autres dans la catégorie mutilations par l’OMS. Cette tentative de maîtrise de la sexualité féminine n’a strictement aucune légitimé, c’est une honte, comme les autres agissements de ce genre.
Les mères souffrent de voir la douleur de leurs filles, mais sont sûres que l’opération est une nécessité… sans trop en connaître le but. L’une d’elles explique : « Je ne sais pas exactement quel est le bénéfice, mais il doit y en avoir un. Je sais que le Prophète a dit qu’il était souhaitable pour le mari que les filles soient « coupées ». En fait, dans l’islam, nous croyons que les femmes ont plus de désir que les hommes, il doit donc exister quelque chose pour le maîtriser et ainsi enseigner aux femmes l’humilité et la modestie. Ç’est peut-être un moyen. Mais dans l’avenir, les scientifiques découvriront ce bénéfice et alors nous le connaîtrons. »
Les musulmans des provinces du sud (Yala, Narathiwat et Pattani) appartiennent à l’ethnie malaise. Une étude conduite en Malaisie en 2011 montre que 93% des femmes ont été mutilées, y compris dans l’Etat de Kelantan culturellement et religieusement similaire à Pattani située à la frontière malaise. En 2009, la pratique a été rendue obligatoire par une fatwa délivrée par la plus haute autorité musulmane de Malaisie.
Comme en de nombreux pays, les mères pensent minimiser les risques de l’opération en optant pour le milieu médical. Les médecins ont donc le choix entre souscrire à leur demande ou respecter les directives de l’OMS qui condamne sans appel ces pratiques. Il n’existe pas d’interdiction légale, les autorités sanitaires du pays (bouddhiste) ferment les yeux.
En Thaïlande, les provinces musulmanes luttent (aussi) pour leur indépendance et sont en insurrection permanente. Les morts par attentats et assassinats se comptent par milliers, les activistes musulmans et l’armée rivalisant d’exactions et de cruauté.
UN LONG FIL D’ARIANE À SAVOURER
Cette question des mutilations sexuelles me rappelle l’une de mes plus fidèles détractrices nommée Ariane Beldi. Sur son site, elle critique le chapitre des mutilations sexuelles d’Islamophobie ou légitime défiance ? à propos bien sûr de la responsabilité musulmane. J’ai tenté de lui envoyer un message de précision lui signalant la vaste enquête que j’ai consacrée à la question. Le message n’a pas paru, probablement pour raison technique.
Un rappel à Ariane : les plus forts taux de mutilations en 2014 concernent la Somalie, la Guinée, Djibouti, l’Egypte (90% et plus de musulmans pour ces pays) et la Sierra Léone (70%). Et l’on attend toujours l’offensive d’organismes musulmans pour combattre l’abjection. Les Occidentaux, eux, ont déjà donné : des milliards de dollars. Et ils continuent.
Je profite de l’occasion pour signaler à mes adversaires une critique qu’elle a consacrée à Islamophobie… et son auteure. Oui, cinq ans après sa parution, car confie-t-elle, elle n’avait pas très envie de débourser 20 francs pour l’achat de cet ouvrage. Mais ayant appris récemment qu’il est téléchargeable gratuitement, elle a «sauté sur l’occasion».
C’est ainsi que ceux qui m’accusent «d’alimenter la haine» pourront se régaler! Trois articles sont à déguster qui représentent quelque… 50 pages, soit l’équivalent du tiers de mon texte. A déguster plutôt au saut du lit qu’au coucher cependant, la lecture se révélant quelque peu soporifique. En ce qui me concerne, le marchand de sable a rapidement passé. Mais je me sens extraordinairement flattée… et admirative devant cette endurance. Décortiquer page après page, durant des heures, cet opuscule «ennuyeux» dont le lecteur «peut se contenter du premier chapitre», c’est m’attribuer une capacité d'influence que je ne soupçonnais pas!
2) Critique
3) Correction des approximations et affirmations erronées de Vallette
Bonne lecture !
Commentaires
"Je sais que le Prophète a dit qu’il était souhaitable pour le mari que les filles soient « coupées".
Aucun verset du Coran ne fait mention des mutilations génitales, (qui se pratiquaient bien avant l'avènement de l'islam). De plus, le seul hadith qui fait mention de l'excision (et qui recommande de couper "légèrement" et de ne pas "exagérer") n'est pas considéré comme authentique. Les collecteurs de hadiths ne s'entendent pas sur l'identité de son rapporteur et selon l'imam Ahmed, il aurait même été tué par le second calife Al-Mansour pour athéisme. Plusieurs spécialistes de l'islam disent qu’il aurait inventé quatre mille hadiths.
"L’Excision des filles au regard de l'Islam", écrit par Dr. Mohamed Salim Al-Awwa, Secretaire Géneral des Ulemas Musulmans
http://www.npwj.org/GHR/L%E2%80%99Excision-des-filles-au-regard-de-lIslam.html
À noter que le 12 janvier 2010, une trentaine d’oulémas mauritaniens émis une fatwa contre l'excision:
http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAJA2558p054.xml1/
Le fait que le hadith soit ou non considéré comme authentique n'a pas grande importance. Quand les imams ou oulémas veulent imposer ou maintenir cette pratique, ils le convoquent. Certains d'entre eux ont déjà émis des fatwas qui condamnent les mutilations, Al-Azar p.ex., d'autres en Indonésie et Malaisie les déclarent obligatoires. Les déclarations et traités internationaux qui les interdisent sont signés sans problème, mais encore une fois, rien n'est jamais entrepris sur le plan pratique au nom de l'islam... Charge aux mères et aux pères de s'informer sur les derniers dires des grands savants?
Dans les populations qui excisent, le tabou est fort: on ne parle pas du sujet dans la vie quotidenne. Mais on croit dur comme fer que l'islam, Dieu et son prophète l'exigent. Et tant que les musulmans resteront les bras ballants, il sera impossible de progresser... Sauf dans les populations animistes ou certains pays (fortement) multireligieux. Mais ces progrès sont anecdotiques vu la dimension terrifiante du fléau. Il concerne des populations représentant 300 millions de musulmans.
Bravo quand même aux oulémas mauritaniens qui j'espère passeront à la lutte sur le terrain -et s'attaqueront aussi à l'esclavage.
Hello
"En fait, dans l’islam, nous croyons que les femmes ont plus de désir que les hommes, il doit donc exister quelque chose pour le maîtriser et ainsi enseigner aux femmes l’humilité et la modestie."
Faut arrêter de manger des piments, ça ira mieux après...
Si la femme a plus de désir que les hommes, d' après le "nous croyons", aucune étude scientifique ne l'a montré d'une part et de l'autre, pourquoi n'autorise-t-on pas qu'une femme puisse se marier avec 4 hommes à la fois si bien entendu les règles de tels mariages sont respectées? Quant à l' humilité et la modestie, il ne faudrait qu'écouter Erdogan et ses copains prêcher qu'une femme ne doit pas faire de bruit en riant dans un lieu public et qu'elle doit faire son job de maternité et basta et avoir 3 enfants en moyenne selon les scientifistes d'Erdogan.
Bonsoir,
Je viens de découvrir que vous avez remarqué la critique que j'ai faite de votre livre. Je n'ai pas l'intention de commenter votre réponse ce soir, mais je voulais quand même signaler que j'ai pris note du problème technique que vous mentionnez. Il semblerait que l'extension CAPTCHA que j'utilise ne fonctionne plus correctement avec les commentaires, empêchant effectivement les gens de répondre à mes billets. Je l'ai donc désactivée et testé le formulaire de commentaires. Il semble que ça marche de nouveau correctement. Si vous désirez publier un commentaire avec des liens vers vos articles, n'hésitez donc pas à le faire.
J'essaierai de répondre à vos objections ces prochains jours. J'ai lu votre "enquête" de 2013 sur les mutilations génitales féminines et j'aurais effectivement pas mal de choses à dire. Et notamment, une remarque technique: dans vos notes de bas de page, les numéros 2,3, 4 et 5 renvoient tous au même communiqué de presse de l'UNICEF, référencé au numéro 2. Apparemment, vous avez dû mal placer la balise fermant le lien.
Ce n'est pas à nous qu'il faut dire que l'excision n'a rien a voir avec l'islam mais à ceux qui pratiquent cette abomination, étant entendu que si cette pratique est concentrée dans les pays musulmans, ce n'est quun caprice du hasard.
Certaines exciseuses cessent leurs activités lorsqu'elles prennent conscience des conséquences dangereuses des mutilations sexuelles. Voici un site qui détaillent ces dernières:
Mutilations Sexuelles Féminines -7 - Les conséquences médicales
http://www.perinat-france.org/portail-gran-public/prevention/violence-conjugales-mutilations-sexuelles/mutilations-sexuelles-feminines/les-consequences-medicales-370-761.html
@Archi-bald
"si cette pratique est concentrée dans les pays musulmans, ce n'est qu'un caprice du hasard."
Un "hasard" influencé par une culture dans laquelle le corps d'une femme est tabou et ne lui appartient pas. Où il est considérée comme la propriété du père avant le mariage et sur lequel repose l'honneur de la famille. Où il est caché, désexualisé et bridé pour demeurer vierge jusqu'à ce qu'un mari en prenne possession.
Dans la culture musulmane traditionnelle, la sexualité d'une femme est exclusivement destinée à la reproduction et au plaisir masculin. Son plaisir à elle est menaçant, car il pourrait lui donner envie de faire l'amour hors du cadre du mariage.
Aucune restriction de ce genre pour les hommes. Au chapitre de la sexualité, l'islam est beaucoup plus généreux envers eux puisqu'il leur permet d'épouser jusqu'à quatre femmes, (répudiables sur un simple caprice), à user sexuellement de leurs esclaves et même à pratiquer le viol de guerre. Comme il prétend interdire la fornication et l'adultère, je présume que ces interdictions ne s'adressent qu'aux femmes.
Dans une telle culture, il n'est pas surprenant que des mutilations destinées à priver les femmes de plaisir sexuel à rendre la pénétration totalement impossible (infibulation) soient considérées comme banales et acceptables.
Suite à un problème technique, le blog de Mme Vallette n'accepte plus ses commentaires (!). Elle m'a donc prié d'envoyer celui-ci à sa place:
@ Minona : « Certaines exciseuses cessent leurs activités… »
Durant des décennies, l'OMS a mis l'accent sur les conséquences des mutilations sur la santé des femmes. C'était à mon avis une erreur stratégique et morale. Les mutilations ne sont pas à condamner d'abord par leurs conséquences physiques.
Le message a si bien passé que de plus en plus de parents choisissent le milieu hospitalier. C'était d'ailleurs le thème de la "Journée tolérance zéro" cette année. Le personnel soignant était prié de ne pas mutiler. Et il se trouve confrontés à ce dilemme: mutiler ou laisser les parents s'adresser à des exciseuses traditionnelles. Ou tenter de les convaincre de renoncer, ce qui n'est pas une mince affaire. Sans compter que ces interventions entrent désormais dans le budget de cliniques et hôpitaux qui n’ont pas envie de se passer de cette manne.
@Mireille Vallette
Vous avez raison et j'aurais dû mentionner cet effet indésirable de la sensibilisation sur les conséquences des mutilations génitales. J'aimerais que les campagnes de sensibilisation comportent un volet "condamnation de la culture du contrôle du corps féminin" ou "promotion d'une sexualité féminine libre" mais j'imagine que les organismes de sensibilisation marchent sur des œufs pour ne pas heurter les "sensibilités religieuses et culturelles".
Il faudrait aussi déboulonner la croyance voulant qu'une femme non-excisée soit perpétuellement assoiffée de sexe. Je ne sais pas si les promoteurs des mutilations réalisent toujours que celles-ci ne font pas disparaître la libido.
Minona: cinq hadiths, et non pas un seul, mentionnent l'excision, comme l'indique d'ailleurs le site que vous mettez en lien, et aucun d'entre eux ne condamne la pratique. Il est donc impossible de l'interdire au nom de l'islam. D'autre part, le fiqh, sur cette base, l'a souvent déclarée obligatoire, sous la signature de savants dont l'influence restera toujours prépondérante aux yeux des croyants.
Ainsi, l'islam est aujourd'hui la principale cause unique de la propagation de cette pratique dans le monde. Et les apologies ne nous aideront pas à en venir à bout.